Représailles. La France deviendra le deuxième pays au monde à imposer cette neutralité. L’Australie l’a fait en 2012, mais l’efficacité de la mesure fait débat. Selon les chiffres officiels, ce serait un succès, mais l’arrivée du paquet neutre a coïncidé avec une hausse des prix des cigarettes.

Pour les buralistes, l’absence de données sur l’éventuel impact du paquet neutre est bien le problème. Pascal Montredon, le président national de la confédération des buralistes, regrette qu’«aucune étude n’ait été faite sur l’effet des photos chocs déjà existantes». Il est sonné par le paquet générique «qui [leur] tombe dessus» et estime qu’il ne s’agit là que d’une «politique de santé spectacle». En représailles à toutes les mesures annoncées, le responsable, qui craint que la mesure «n’engendre l’augmentation du marché parallèle», promet une mobilisation des buralistes «aux côtés de toutes les professions humiliées, comme les pharmaciens, les notaires ou les chauffeurs de taxi».

Rémi Vicente, gérant d’une agence de communication et de design packaging, et lui-même fumeur, parie de son côté que les photos auront un effet : «Depuis qu’il y a ces horribles images, ça dégoûte un peu d’avoir le paquet sur soi ou sur la table. J’ai tendance à le retourner d’ailleurs. Alors il y aura sans doute une plus grande prise de conscience.»

«Débanaliser». Le gouvernement se donne cinq ans pour faire baisser le nombre de fumeurs de 10%. Aujourd’hui, environ 30% des Français fument et 73 000 personnes meurent chaque année du tabac. Le nouvel arsenal, qui sera soit intégré au projet de loi santé présenté prochainement au Conseil des ministres, soit mis en œuvre par décret, veut «débanaliser» la consommation. Fumer dans une voiture qui transporte des enfants de moins de 12 ans sera par exemple interdit. Un fonds consacré à la prévention et à l’information sera également créé et mettra à contribution l’industrie du tabac, laquelle sera par ailleurs visée par une mesure prévoyant le renforcement de la transparence sur les activités des lobbys auprès des politiques. «C’est révolutionnaire !» d’après Yves Martinet, le président du Comité national contre le tabagisme.

Pour l’association, le plan dans son ensemble est très satisfaisant : «C’est la première fois, en France, qu’on a un programme aussi complet pour attaquer le problème.» Selon lui, l’engagement conjoint de François Hollande et de Marisol Touraine a été déterminant, «exceptionnel» même. Un tandem qui lui rappelle l’efficacité du binôme Jacques Chirac-Xavier Bertrand, qui avait interdit le tabac dans les lieux publics en 2006.

Les vapoteurs ne sont pas non plus épargnés. La cigarette électronique – qui compte environ 2 millions d’adeptes – sera bannie des établissements accueillant des mineurs, des transports en commun et des lieux de travail clos.

Richard Pfeiffer, le président du Syndicat national des professionnels de la cigarette électronique, affirme que, même si le gouvernement a l’air de limiter l’interdiction à une petite liste d’endroits, il faut en fait y voir une «interdiction globale». Par exemple, les restaurants ne sont pas mentionnés explicitement mais, comme ils peuvent accueillir des mineurs, Richard Pfeiffer craint qu’ils ne tombent sous le coup de l’interdiction. Or selon lui, «renvoyer un vapoteur sur le trottoir, avec les fumeurs, c’est criminel». Ce vendredi, une campagne de sensibilisation sur le thème «le tabac tue un fumeur sur deux» doit être lancée.

Source: http://www.liberation.fr/societe/2014/09/25/un-plan-antitabac-qui-pour-une-fois-ne-megote-pas_1108633