Passera-t-il ou ne passera-t-il pas ? Marisol Touraine en a fait une forme d’étendard de sa lutte contre la consommation de tabac. Faute de pouvoir agir contre les volontés de Bercy la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes entend imposer le paquet neutre. Sans argumentaire chiffré ni bases scientifiques (la victime d’une addiction fait-elle attention au contenant de sa drogue ?) mais avec l’espoir que cette neutralité marquera les esprits. Une forme de déclinaison sur papier de ce que fut la loi Evin dans l’espace. Le paquet neutre devenu automatique faute de vouloir prendre en compte la réalité et les espoirs inhérents à la cigarette électronique.
Amendements d’avril
Aux dernières nouvelles le paquet neutre de cigarettes (proposé pour lutter efficacement contre le marketing) devrait faire l’objet d’un amendement gouvernemental au projet de loi relatif à la santé qui devrait commencer à être examiné par le Parlement à compter d’avril.
Il en ira de même des « espaces de vente sans publicité », des « véhicules sans tabac en présence d’enfants », de l’ « interdiction de la publicité pour les cigarettes électroniques », de « l’interdiction de vapoter dans certains lieux publics », de « l’habilitation des policiers municipaux à exercer les contrôles de la règlementation liée au tabac », de « l’interdiction des arômes artificiels qui attirent les jeunes » ou encore de « la transparence du lobbying de l’industrie du tabac ».
Déclenchement des hostilités
Pour l’heure les buralistes-dealeurs ciblent la paquet-neutre et viennent de déclencher les hostilités véritables comme vient de l’annoncerlemondedutabac.com. La Confédération des buralistes vient ainsi de mettre en place un « site de lutte contre le projet de paquet neutre de Marisol Touraine ».
On peut le découvrir ici : http://nonaupaquetneutre.fr/
Facebook :
Voici ci-dessous, une de leur idée pour dénoncer à leur manière, cet « abus ».
Les slogans sont annoncés. « Avec votre buraliste, dites non à la punition ! » ou encore : « ça c’est de l’humiliation ! » en commentaire de lavision des dégâts vasculaires périphériques de la consommation de tabac. Des dealeurs faisant cause commune avec les consommateurs pour maintenir coûte que coûte les situations de dépendance dans lesquelles ils sont, les uns comme les autres.
Arguments de poids
On pourrait, bien sûr, sinon caricaturer du moins dénoncer biens des aspects de l’action des buralistes-dealeurs. Et sans doute faut-il souvent le faire pour des raisons de santé publique. Force est pourtant aujourd’hui de constater qu’ils avancent des arguments de poids. Des arguments qui réclament aux plus vite des réponses gouvernementales affûtées.
Exemple :
« En renvoyant les fumeurs à une position de coupables et les buralistes à un statut de commerçants irresponsables, le paquet neutre est l’étape suprême dans l’approche punitive qui masque, par ailleurs, les échecs de la politique de santé en matière de tabac.
Le tabac est un produit sensible dont la nocivité n’est pas contestée, mais la position des pouvoirs publics est à la fois caricaturale et hypocrite. En les marquant avec un paquet qui stigmatise le tabac dans de telles proportions, on jette l’opprobre sur les fumeurs et buralistes pour avoir consommé ou vendu un produit légal.
C’est bien d’une pression morale et psychologique qu’il s’agit, consistant à dire aux fumeurs et aux buralistes : « On vous considère comme des coupables même si vous avez un produit légal entre les mains ».
À quand une approche raisonnable de la politique contre le tabagisme qui traitera les gens en adultes et non plus en enfants ? »
Impasses de la culpabilisation
Ou encore :
« Par quel étrange renversement les fumeurs sont-ils devenus, non plus victimes du tabac, mais coupables de fumer ? Étrange et contre-productif. Tabacologues et addictologues se rejoignent pour pointer du doigt les impasses de la culpabilisation.
Face à une addiction, ce n’est pas en faisant appel à des arguments moralisateurs (« il faut que tu arrêtes », « c’est mauvais pour toi », « tu as pensé à tes enfants » etc.) que l’on aide les gens à en sortir. Arrêter de fumer est avant tout une démarche personnelle qui doit être accompagnée par l’entourage du fumeur et des aides financières au sevrage.
Quant à celles et ceux qui n’envisagent pas, ou pas encore, d’arrêter de fumer, qui peut croire que le paquet neutre les écartera du tabac, alors qu’ils se sont habitués en quelques semaines aux messages sanitaires et aux visuels-chocs que l’on trouve déjà au dos des paquets ?
La bonne approche, c’est la prévention. Les buralistes ont proposé qu’on les autorise à commercialiser des substituts nicotiniques et même à installer des corners de prévention dans leurs commerces, mais ces propositions n’ont pas eu l’air d’intéresser les pouvoirs publics. »
Proprement ahurissant
Il est remarquable que ce soit les buralistes qui, en 2015, fassent un telle analyse. Et il y a quelque chose de proprement ahurissant à observer que ce gouvernement, comme tous ceux qui l’ont précédé, soit incapable de bâtir une politique véritable de lutte contre le tabagisme. Une politique pragmatique qui (comme au Royaume-Uni) prenne véritablement et raisonnablement en compte l’esclavage dans lequel se situent les consommateurs devenus dépendant – mais aussi l’esclavage indirect, comme contagieux, de toutes celles et ceux qui vivent la dépendance mortifère du fumeur.
Source : http://jeanyvesnau.com/2015/03/03/comment-les-buralistes-vont-dynamiter-le-paquet-neutre-voulu-par-la-ministre-de-la-sante/