Toujours plus, en pire. Les autorités sanitaires (et la ministre de la Santé) tenaient jusqu’ici pour acquis le chiffre (assez effroyable) de 73.000 morts prématurées annuelles associées à la consommation de tabac en France. Il faudra désormais le revoir à la hausse – du moins si l’on veut bien croire le résultat du travail conduit par les épidémiologistes Catherine Hill et Laureen Ribassin-Majed (Institut Gustave-Roussy, Inserm). Un travail qui vient d’être publié sur le site de The European Journal of Public Health. On passe ainsi de 75 000 à 78.000 – 5 000 morts de plus en an…
Parité addictive
La part des morts de femmes ne cesse d’augmenter, ces femmes qui se sont mises plus tardivement à la cigarette par rapport aux hommes, celles qui ont fumé sérieusement atteignent aujourd’hui l’âge où les dégâts sont importants.En 1980, le tabac tuait prématurément 2.700 femmes en France. Trente ans plus tard elles étaient 19 000. Le phénomène s’inverse chez les hommes : de 66.000 morts en 1985 à 59.000 en 2010.
Tout s’est passé comme si les politiques anti-tabac (hausses des prix, interdiction de la publicité, mesure contre le tabagisme passif) avaient surtout eu un effet chez la consommation des hommes. Au contraire, les femmes qui âgées de 20 ans dans les années 70 se sont mises à fumer beaucoup et les générations suivantes ont continué – le tabac fut ainsi un stigmate d’une forme de conquête de la liberté, d’accès à la parité, mais dans l’addiction.
Euphémisme électronique
Les deux sexes confondus, le tabac est aujourd’hui la cause majeure de mort chez les 35-69 ans. La pathologie cancéreuse est généralement celle induite par le tabac: 47.000 des 78.000 morts en 2010 (cancer du poumon pour 28.000 cas). Selon cette étude, 58% des décès par cancer chez les hommes de 35 à 69 ans sont provoqués par le tabac. Les affections cardiovasculaires et respiratoires sont les deux autres grandes causes de morts « anticipées » imputables au tabac : respectivement 20.000 et 11.000 morts.
C’est dans ce paysage à tous égards inacceptable qu’un «plan anti-tabac » a été adopté en avril par les députés en première lecture, dans le cadre de la loi santé. Il prévoit, en particulier, d’instaurer en mai 2016 des paquets de cigarettes neutres, sans couleur ni logo des fabricants. Aucune mesure drastique de hausse des prix n’étant prévue (euphémisme) tout laisse penser que le « paquet neutre » n’attendra pas, et de loin, les espoirs que dit mettre en lui la ministre de la Santé.
Qui sera là en 2020?
Ce qui n’empêche pas cette dernière d’avoir élaboré (à la demande du président de la République) un « Plan national de réduction du tabagisme » (sans s’aider – nouvel euphémisme- du puissant levier qu’est la cigarette électronique). Voici le Plan exposé par Mme Touraine:
« • Dans 5 ans, le nombre de fumeurs doit avoir baissé de 10%.
• Dans 10 ans, nous devons être descendus sous la barre des 20% de fumeurs.
• Dans moins de 20 ans, nous voulons que les enfants qui naissent aujourd’hui, soient la première génération de non-fumeurs. »
On compte aujourd’hui en France environ treize millions de fumeur. Combien seront-ils en 2020 ? Combien, cette année-là, mourront prématurément du tabac ? Qui sera, alors, ministre de la Santé ? Et de l’Economie ? Des actions en justice auront-elles commencé à être engagées ? D’ici là le tabac aura tué près de 400 000 personnes.
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